text
stringlengths
0
211k
Les recherches de Buckley à la NASA l'ont conduit à écrire : les jonctions à l'interface, l'adhésion et le transfert à travers l'interface, sont extrêmement importants pour la compréhension de l'usure. Ces processus se placent fréquemment au niveau atomique, et il est par suite nécessaire d'examiner à ce niveau les surfaces en contact. L'auteur décrit ensuite quelques appareils et procédés d'étude indispensables :
En 1968, le Professeur Robert Courtel fait remarquer, après avoir donné une rapide liste des laboratoires français disposant de l'un ou l'autre de ces matériels, que « "ces appareils sont en général coûteux et encombrants : chaque nouveau modèle tombe très vite en désuétude ; les utilisateurs potentiels n'en sont pas nécessairement les possesseurs. Il y a donc une politique à définir en haut lieu, pour que les tribologues soient admis aux bénéfices de ces belles recherches "».
Le microscope à force atomique.
Cet appareil a fait récemment son apparition dans les laboratoires de tribologie. On parlera de MFA dans les textes français ou de AFM ("atomic force microscope") dans les textes anglais. Les renseignements fournis par cet appareil sont ceux que l'on aurait en balayant la surface avec un stylet dont la pointe serait à l'échelle du nanomètre. Ses applications sont diverses :
Le microscope à force atomique peut être utilisé à l'air libre pour étudier des matériaux très variés tels que les métaux, les céramiques, les polymères ou les biomatériaux. On peut aussi faire des mesures dans le vide ou dans les liquides.
Le frottement à distance.
Des phénomènes de frottement se produisent entre des objets qui ne sont pas en contact mais dont les distances sont de l'ordre du nanomètre. Ce phénomène est peu connu et difficile à interpréter. Des chercheurs de l'université Cornell, aux États-Unis en ont entrepris l'étude.
Diverses interprétations ont cours actuellement. Il semble selon certains avis qu'un processus d'accrochage se produise entre les atomes des « bosses » d'une des surfaces et ceux des « vallées » de l'autre, un peu à la manière d'un « Velcro » miniature. On sait de façon certaine que ce phénomène dépend étroitement de la composition chimique des surfaces et donc des faibles champs électriques engendrés par le mouvement des molécules des échantillons étudiés.
Commande des forces de frottement dans les nanomécanismes.
Lorsque les mécanismes se miniaturisent à l'extrême, on ne peut plus traiter les phénomènes de friction et d'usure comme on le fait pour la mécanique courante. Les forces de surface deviennent très importantes par rapport aux forces de volume, la quantité de matière consommable par usure avant la mise hors service est très réduite, les lubrifiants confinés dans de très petits espaces deviennent très visqueux, etc.
La possibilité de modifier à volonté les forces de frottement par des procédés électriques est désormais prouvée, des recherches sont actuellement conduites aux États-Unis et en Suisse (université de Bâle) en vue de l'appliquer aux nanomécanismes comportant des éléments mobiles. Il serait possible d'activer ou de désactiver les frottements, un peu comme on allume ou éteint une lampe.
On connaît le rôle des atomes superficiels dans les phénomènes de frottement. En provoquant leur vibration perpendiculairement à la surface de contact des pièces, on diminue considérablement les forces de frottement et on supprime le « stick-slip », sans faire usage du moindre lubrifiant. Ces effets disparaissent en même temps que la vibration.
Tribologie/Nature et comportement des surfaces frottantes
Le frottement et l'usure mettent en jeu les surfaces de contact ou plus précisément les interfaces, où se produisent des transformations multiples et irréversibles qu'il faut considérer de plusieurs points de vue :
« Dieu a inventé les volumes, mais c'est le diable qui a inventé les surfaces », déclara un jour Wolfgang Pauli, confronté à l'extrême complexité du problème ... mais ce n'est pas une raison suffisante pour se décourager !
Aspects géométriques.
Frank P. Bowden et David Tabor ont ainsi présenté les choses : « "Les surfaces, même les plus polies, sont grossières à l'échelle atomique et en les plaçant en regard c'est comme si vous retourniez la Suisse et la disposiez au-dessus de l'Autriche" ».
Les surfaces usinées ne sont jamais parfaites, elles présentent au contraire des défauts de toutes sortes dus aux procédés d'usinage, aux outils, à la matière, etc. On sait depuis longtemps que ces défauts influent profondément sur la tenue en service des mécanismes et la bonne exécution de leurs fonctions : guidages, étanchéité, ... Quelle que soit la qualité de la fabrication, il existe toujours une échelle suffisamment petite pour que les défauts soient mesurables et la nécessité de les décrire ne date pas d'hier.
Dans « La technique moderne » du 15 juin 1939, l'Ingénieur Général Pierre Nicolau écrivait :
"Esclaves de disciplines mathématiques dont toute la savante complexité ne pouvait suffire à rendre compte des imperfections humaines et des caprices de la nature, les ingénieurs ont longtemps méconnu que la valeur pratique des éléments de construction dépend beaucoup plus de leurs caractéristiques locales que des propriétés moyennes de la matière."
"Ils savent aujourd'hui l'influence prédominante des aberrations et des hétérogénéités de tout ordre, nécessaires ou fortuites, sur la tenue en service de ces éléments ; aussi, depuis quelques années, leur attention s'est-elle tout naturellement portée sur les anomalies superficielles des pièces mécaniques, dont le rôle, évidemment essentiel dans tous les phénomènes de contact (frottement, usure, corrosion, graissage, écoulement des fluides, etc.), s'est par surcroît révélé particulièrement important sous l'effet des sollicitations vives ou périodiques. Une science des états de surface s'est ainsi créée."
Plus la qualité d'une surface est proche de la perfection, plus elle est difficile à obtenir et plus son coût est élevé. Des surfaces inutilement précises causent des pertes économiques qui peuvent être considérables.
"« Enough is perfect »", dit-on outre-Atlantique !
La description de la finesse d'usinage par un, deux ou trois petits triangles, utilisée pendant des décennies, est depuis longtemps devenue très insuffisante. La vue et le toucher donnent des évaluations subjectives intéressantes mais généralement inadaptées aux nécessités techniques ; de plus, les appréciations sensorielles sont trop subjectives et constituent une source de contestations dans les relations commerciales.
Définitions.
La normalisation précise les termes à utiliser :
Les ordres de défauts.
On appelle profil l'intersection de la surface réelle avec un plan perpendiculaire à la surface géométrique qui lui correspond.
Un palpeur sphérique explorant une surface vient successivement en contact avec les sommets des aspérités et « saute de crête en crête ». Pour mettre en évidence des défauts de plus en plus petits, il faut diminuer le rayon de ce palpeur, ainsi, l'enveloppe de ses positions successives (ici en trait fort) et la trajectoire du centre du palpeur se rapprochent-elles du profil de la surface réelle.
Il est clair que le tracé du profil exact, c'est-à-dire la détermination de l'écart entre la surface réelle et la surface géométrique nécessiterait un palpeur de rayon nul, ce qui est évidemment impossible. En pratique, le résultat de la comparaison de la surface réelle et de la surface géométrique dépend de l'appareillage utilisé. Encore y aurait-il quelques commentaires à faire sur les déformations des aspérités sous l'effet de la pression du palpeur...
En pratique, on distingue plusieurs ordres de défauts :
Ce découpage est parfaitement arbitraire : il y a autant de défauts de forme et donc de rugosités, que de manières de choisir le rayon R qui engendre la surface apparente. Comme l'a fait remarquer l'Ingénieur Général Nicolau : « une surface n'est pas rugueuse en soi, mais par rapport à une surface déterminée qui la touche. C'est ainsi, par exemple, que l'on pourrait imaginer une surface qui apparaîtrait très rugueuse au toucher de l'homme et qui serait parfaitement lisse pour le ciron qui la parcourrait. À monter et descendre les côtes sur un sol qui, à l'échelle de ses pattes, prendrait le caractère d'une patinoire, cet animalcule n'aurait que la sensation d'erreur superficielle de forme ».
Enregistrement des états de surfaces.
Il faut se méfier des enregistrements qui donnent une image spectaculaire mais exagérée de l'état des surfaces des pièces. En fait la pente moyenne résultant des usinages courants n'est guère que de 20 à 25 %, et les surfaces ressemblent sans doute plus aux monts très émoussés du Morvan qu'aux Aiguilles de Chamonix. Les déplacements des palpeurs, davantage amplifiés perpendiculairement à la surface, provoquent un effet d'anamorphose.
La distribution des hauteurs d'aspérités n'est en général ni isotrope ni gaussienne, sauf pour certains procédés tels que le sablage ou électroérosion.
Une très intéressante méthode d'enregistrement des états de surface est due à l'abbé Cayère, qui fut voici quelques décennies un éminent professeur de technologie. Un « marteau » spécial donne des répliques d'états de surface par écrasement d'un métal mou, aluminium recuit ou autre.
Pour une surface plane, on utilise un marteau bombé, inversement, pour une pièce bombée, on utilise un marteau plan. On lâche ce marteau depuis des hauteurs croissantes, jusqu'à ce que le métal remplisse complètement les « vallées » qui séparent les aspérités.
Cela donne une réplique en creux, dite « empreinte Cayère », qui peut servir pour mesurer les hauteurs d'aspérités, puisque formula_1.
Par ailleurs, les bords de l'empreinte reproduisent le profil sous un aspect anamorphosé, avec un grandissement formula_2.
L'intérêt majeur des empreintes Cayère est de visualiser l'évolution des surfaces, par exemple lors d'un essai d'usure.
Divers appareils restituent l'enregistrement tridimensionnel des états de surface sous forme de graphiques tridimensionnels
Les couches superficielles.
Le frottement est un phénomène à trois dimensions qui concerne une certaine épaisseur de matériau sous la surface. À partir de cette dernière, on doit distinguer plusieurs couches successives qui existent sur l'immense majorité des pièces.
couche adsorbée.
Il ne faut pas confondre adsorption, fixation sur les surfaces de molécules provenant des gaz et des liquides ambiants, et absorption. Ces molécules sont retenues par les forces de Van Der Waals (celles qui permettent la cohésion des solides) ou plus énergiquement encore par des forces de type chimique si les atomes de la surface possèdent des valences non saturées. On parle alors de chimisorption. L'adsorption résulte d'un équilibre entre une évaporation et une condensation.
Dans l'atmosphère, toute pièce est instantanément recouverte d'une couche adsorbée formée surtout d'oxygène, avec d'autres gaz comme la vapeur d'eau, le dioxyde de carbone, etc. Aucun nettoyage mécanique ou chimique ne peut les éliminer totalement des surfaces métalliques, à moins que l'on ne procède sous vide et à chaud (1 000°C ou plus).
La lubrification n'est rien d'autre qu'une « pollution organisée » par adsorption d'hydrocarbures ou mieux par chimisorption d'acides gras ou de produits soufrés, chlorés, phosphorés ... L'énergie de surface élevée des métaux facilite l'adsorption des lubrifiants sauf, on ne sait pourquoi, dans le cas du titane, du zirconium et de l'hafnium.
Les longues molécules d'acides gras, orientées perpendiculairement à la surface « comme des sangsues fichées sur la couche cristalline sous-jacente » (Trillat), sont à peu près inexpugnables.
Les couches adsorbées, épaisses de 0,2 à 8 nm, liées rigidement aux solides, sont plus solides sur les reliefs. Il existe d'ailleurs une rugosité optimale pour leur accrochage. Leur forme est déterminée par les structures cristallines sous-jacentes. On peut dire qu'elles jouent un rôle essentiel dans les processus de frottement. Deux corps frottant dans le vide sans préparation spéciale voient leur coefficient de frottement multiplié par un facteur 2 à 4. Après dégazage sous vide, il peut atteindre 100.
post-couche.
Quand elle existe, c'est sous l'action de la couche adsorbée. Elle a été assez peu étudiée. Constituée surtout d'oxydes et, après frottement, de métaux de la pièce antagoniste, elle peut atteindre 80 nm. D'autres composants, difficiles à identifier, sont des sulfures ou des nitrures souvent plus fusibles que l'oxyde : par exemple NiS 600°C, CuS 220°C, FeS 1200°C, etc. Sur certains métaux comme l'argent, dont la surface ternie est très facile à repolir, la post-couche a une très faible adhérence.
Les couches d'oxydes, dont on connaît mal les processus de formation, se comportent en frottement comme la neige tôlée pour les skieurs. Elles sont renforcées par un substrat dur et affaiblies par des aspérités hautes et aiguës. Leur présence est parfois souhaitable si elles résistent à l'arrachement mais elle est toujours indésirable si elles deviennent pulvérulentes et abrasives. Les anciens artisans horlogers connaissaient intuitivement le rôle des oxydes lorsqu'ils brunissaient les pivots.
L'aluminium, très oxydable, se couvre d'une peau d'alumine étanche aux gaz et résistante. Une bille d'acier frottant sur de l'aluminium commence par glisser sur la couche d'alumine, qui résiste malgré une déformation importante en sous-couche. Si la couche d'oxyde se rompt, alors le grippage survient immédiatement, la trace de frottement voit sa profondeur augmenter et un important bourrelet frontal la précède.
Les aciers alliés au chrome, très utilisés en frottement, voient de même leur surface s'enrichir en oxyde de chrome.
couche amorphe de Beilby.
La structure cristalline du métal est détruite sur une épaisseur de 0,1 à 5 μm, qui dépend du mode d'élaboration de la pièce. On y trouve des atomes ou molécules du matériau et de l'environnement, des oxydes, nitrures ... Pour les alliages, la composition devient hétérogène, complexe et mouvante en fonction de la ségrégation des éléments, laquelle est provoquée ou non par le frottement. Engendrée surtout lors d'opérations comme la rectification ou le polissage, la couche de Beilby répartit les charges et consolide les films d'oxydes mais on préconise parfois de l'ôter par superfinition.
couche écrouie.
Sous la surface des matériaux cristallins, qui sont les plus fréquents (ils comprennent tous les métaux et leurs alliages), on trouve généralement une couche plus ou moins perturbée par la fabrication sur une épaisseur de 0,02 à 0,05 mm et contenant encore des inclusions venant de l'extérieur.
On parle de transformation « liée » quand la surface usinée vient en appui sur un outil et de transformation « libre » dans le cas contraire : électroérosion ou polissage électrolytique, par exemple. La première ne donne ni couche amorphe, ni couche écrouie.
La transformation des surfaces destinées au frottement comporte presque toujours une phase d'ébauche par un outil coupant, suivie d'une finition par abrasion : rectification, polissage, sablage, etc. Un tiers environ de l'énergie de coupe se perd dans les pièces. Le champ de forces au passage de l'outil provoque deux sortes de déformations non élastiques : d'une part les microcristaux glissent les uns par rapport aux autres au niveau des joints de grains, d'autre part des glissements se produisent dans les microcristaux eux-mêmes par cisaillement. L'écrouissage extrême rejoint l'état amorphe. Les couches écrouies gardent à jamais le souvenir de leur usinage.
La capacité de déformation des couches superficielles varie énormément selon leur structure. Dans les grains des métaux, les dislocations se propagent selon les plans de plus forte densité atomique et dans la direction de la plus forte densité linéique. Ces déplacements se produisent en surmontant les obstacles que constituent les défauts des réseaux cristallins. Ils sont facilités par les températures élevées.
Lorsque le glissement plastique surmonte un point de blocage particulièrement stable, il y a émission d'un bruit dont le spectre peut aller des ultrasons aux fréquences audibles (on perçoit facilement un tel bruit en pliant une plaque de zinc, les spécialistes parlent d'ailleurs du « cri du zinc »).
Les matériaux qui possèdent un grand nombre de directions de plans dont les densités atomiques sont voisines s'écrouissent facilement. C'est malheureusement le cas du fer. Au contraire, s'il y a un seul plan de glissement, la lésion est difficile, comme pour le soufre.
L'écrouissage est réduit par lubrification. Il varie beaucoup, et de manière complexe, avec les conditions de coupe : par exemple, la profondeur de passe influe davantage avec les aciers rapides qu'avec les carbures et les céramiques.
couches profondes accessibles aux efforts de frottement.
Le métal sous la couche écrouie est une construction cristalline imparfaite, un arrangement de grains conditionné par l'élaboration, la composition chimique, l'histoire thermique et mécanique de la pièce. Les structures obtenues par moulage, laminage, forgeage, dépôt de matière, ... sont très différentes.
Les zones non défigurées par l'usinage n'en sont pas moins accessibles aux efforts de frottement, aux effets thermiques, à la fatigue, etc. et elles présentent de nombreux défauts :
Structure granulaire des surfaces.
L'existence de structures polycristallines sous-entend la présence de discontinuités entre les grains élémentaires formant les pièces et plus particulièrement leur surface.
Les atomes des joints des grains n'appartiennent pas aux plans réticulaires de ces derniers mais à une structure perturbée avec des zones renfermant un excès d'énergie potentielle appelée énergie interfaciale (Crussard), ce qui produit des effets très spécifiques.
Par exemple, les joints sont plus rigides à froid que les cristaux voisins mais à chaud c'est le contraire. En raison des défauts superficiels, les grains de la surface sont moins solides que les autres : ainsi, la résistance maximale du verre qui devrait en théorie atteindre 11000 MPa, dépasse à peine 20 en pratique. En réduisant les défauts, Griffith a réussi à obtenir 630 MPa en laboratoire. Dans ces conditions il est clair que les notions de dureté, de limite d'élasticité, de résistance à la rupture, ... sont sans intérêt sur des ensembles de grains trop restreints pour que l'on puisse appliquer la loi des grands nombres.
Le frottement déplace les grains les uns par rapport aux autres, surtout si les joints contiennent du plomb ou de l'oxyde de plomb. Les glissements dans les grains et la rotation de ces derniers qui use leurs interfaces peut aboutir à des fractures dans les zones de fort cisaillement et à une décohésion, par exemple par frottement sous forte charge. La présence d'oxydes entre les grains est prouvée jusqu'à plusieurs dixièmes de mm de profondeur, surtout dans les frottements secs à grande vitesse.
Les plans de glissement dans les microcristaux, comme les joints des grains, constituent des voies de pénétration pour les éléments apportés lors des traitements de surface, ainsi que l'on peut le constater dans les couches sulfinuzées où l'on distingue parfaitement des lignes de sulfure de fer. Ces dernières favoriseront plus tard des déformations utiles à l'accommodement des surfaces lors du rodage.
Pressions de contact.
Position du problème.
Les surfaces fonctionnelles utilisées en frottement sont presque uniquement des plans, des cylindres et des sphères.
Si les contacts théoriquement ponctuels comme celui d'une bille et d'un plan, ou théoriquement linéiques comme celui d'un cylindre monté dans un autre avec du jeu (palier cylindrique), l'étaient vraiment, ils subiraient en charge des pressions infinies, ce qui est impossible. En fait, les charges sont supportées par des aires de contact très petites, dont l'étendue dépend de la géométrie locale et de l'élasticité des matériaux. À leur niveau, les pièces subissent des contraintes dues à l'effort normal et d'autres, qui se superposent aux premières, dues aux efforts tangentiels.
Lors des contacts surfaciques, plan contre plan par exemple, les zones réelles d'appui sont très restreintes. Il y en a au moins trois non alignées et l'expérience montre que leur comportement est très proche de celui d'un contact bille sur plan.
Théorie de Boussinesq et Hertz.
Sans entrer dans le détail de ce qui demande en soi un chapitre entier, il faut mentionner ici quelques éléments sur la répartition des contraintes dans les zones de contact. Les travaux, classiques, de Boussinesq et Hertz reposent sur plusieurs hypothèses :
Ainsi, se trouvent négligés des facteurs tels que l'hétérogénéité des matériaux réels, la rugosité des surfaces et surtout les forces tangentielles dues au frottement.
Les principaux résultats mis en évidence par Boussinesq, puis par Hertz, sont les suivants :
On parle de contact hertzien, de pression de Hertz, etc.
Lorsque l'on fait intervenir le frottement, le problème devient très compliqué et, d'ailleurs, contraire aux hypothèses de Hertz. Les modifications essentielles qui en résultent sont développées dans le chapitre spécial et se résument pour l'essentiel aux points suivants :
Naturellement, chacune de ces sortes de contraintes donne des formes de dégradation particulières : déchirures de surtension à l'arrière ou autour des frotteurs, écoulements et fluages à l'avant, fatigue ou effondrement des couches profondes sous l'effet du cisaillement maximal appliqué de manière cyclique ou non. Tout ceci est analysé dans le chapitre consacré à l'usure.
Les idées de Bowden sur le frottement.
Pour l'essentiel, les idées claires dont nous disposons sur ce sujet sont dues à Bowden.
Début du frottement.
Les surfaces réelles n'ont pas grand-chose à voir avec les traits du dessinateur. Les charges sont appliquées en un très petit nombre de points où agissent des pressions considérables. Des contraintes mécaniques localement énormes entraînent des déformations élastiques et plastiques répartissant les charges.
Dans les premiers instants du fonctionnement ces efforts exagérés entraînent une augmentation des aires d'appui, il y a une période d'adaptation des surfaces appelée accommodement. Il est important au cours de cette phase que les déformations soient maîtrisées et même provoquées de manière judicieuse.
Coup de râpe initial.
L'expression est due à Marcelin : les rares aspérités sur lesquelles portent les pièces s'accrochent, sont arasées par les premiers mouvements relatifs, décapitées, déchiquetées, déformées plastiquement jusqu'à répartition correcte de la charge. C'est la période la plus difficile du rodage, qui est la première usure d'un mécanisme, par les chocs des aspérités, l'émission de débris abondants et l'échauffement. Les aspérités moins hautes que les autres sont moins sollicitées, ne dépassent pas la limite d'élasticité et reprennent leur forme. Des zones de variétés allotropiques différentes, qui n'ont pas la même limite d'élasticité, sont diversement déformées.
Les surfaces ne deviennent conformes aux hypothèses de Hertz qu'après le coup de râpe initial, d'après Marcelin.
Premières transformations.
Le point de fusion de l'un au moins des métaux est atteint de manière localisée et fugitive, ce qui provoque tout un ensemble de phénomènes physiques et chimiques : fusion, diffusion, trempe, formation de solutions solides et de composés ioniques, oxydations, transformations allotropiques, soudures, arrachements, concassage des cristaux superficiels ...
L'échauffement microlocalisé aux aspérités en contact à un instant donné est prouvé par effet thermoélectrique. L'expression température-éclair décrit bien les successions d'échauffement et de refroidissements à des taux de 107°C/s.