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Pour envisager le problème à l'échelle infinitésimale, il faut supposer qu'il existe pour l'aire de contact S une échelle d'observation telle que les phénomènes qui se produisent à l'interface donnent l'impression d'être continus.
Dans ces conditions, il est possible de diviser S en éléments dS assez petits pour que l'on puisse considérer :
Ces deux hypothèses conduisent à assimiler chaque élément dS à une petite portion de plan située autour d'un point central M et à laquelle on associe un vecteur unitaire normal formula_27 extérieur à la matière.
On représente ici par formula_28 la force élémentaire appliquée par la pièce A sur la pièce B, au niveau de l'élément de surface dS. Cette force peut toujours être « décomposée » d'une manière unique en une force normale formula_29 dirigée suivant formula_27 et une force tangentielle formula_31 située dans le plan de la surface dS.
Bien évidemment formula_32
Si l'on appelle p la pression de contact au niveau de dS, alors on peut aussi écrire :
formula_33
La composante tangentielle formula_31 donnera quant à elle une contrainte tangentielle. En plus des pressions de contact comptées dans la direction perpendiculaire au petit élément de surface, le frottement engendre donc un effet de cisaillement.
L'étude globale devrait théoriquement se faire en intégrant les effets de toutes les petites forces de contact élémentaire, mais il est clair que si la surface de contact de deux corps est un tant soit peu complexe, les calculs deviennent très vite inextricables. Tout l'art consistera donc à créer des modèles d'étude pas trop éloignés de la réalité.
Oscillations de relaxation, stick-slip.
Les lois du frottement, appelées plus ou moins à tort « loi de Coulomb », et sur lesquelles nous reviendrons dans le chapitre suivant, stipulent que le facteur de frottement ne dépend que de la nature des matériaux en présence et de l'état de leur surface, et qu'il est indépendant de facteurs comme la pression de contact, la vitesse de glissement, la température, etc. Ce n'est évidemment qu'une approximation souvent grossière.
Le facteur d'adhérence est généralement supérieur, parfois de beaucoup, au facteur de frottement. Nous allons montrer comment cela favorise l'apparition d'un phénomène de glissement saccadé que les anglo-saxons nomment stick-slip (littéralement colle-glisse) et qui est une . Les exemples ci-dessous vont illustrer ce phénomène :
Glissement d'une masse poussée par un système élastique.
Une masse M de poids 100 N peut glisser sur un plan horizontal sous la poussée d'un ressort R que l'on comprime en faisant tourner très lentement une vis V. On admettra que le facteur d'adhérence vaut 0,3 et le facteur de frottement 0,25 ; la raideur du ressort est k = 1 N/mm.
Lorsque la force fournie par le ressort atteint 30 N, la masse démarre. Le ressort est alors comprimé d'une quantité X = 30 mm et son énergie potentielle vaut :
Dès le début du glissement, la résistance à l'avancement n'est plus que de 25 N ; comme la force appliquée par le ressort vaut 30 N, la masse M va « bondir », puis s'arrêter après avoir parcouru une certaine distance d. À la fin de ce mouvement, l'énergie potentielle du ressort vaut :
La variation de l'énergie potentielle du ressort entre le début et la fin du mouvement correspond au travail des forces de frottement le long du parcours :
On en tire :
On remarquera que lorsque la masse s'est arrêtée, la tension du ressort ne vaut plus que 20 N. Il faudra faire avancer la vis de 10 mm pour provoquer un nouveau déplacement. Si la vis tourne lentement et d'un mouvement continu, la masse avance par bonds successifs de 10 mm.
Vous pourrez reproduire facilement ce phénomène en tirant une masse par l'intermédiaire d'un élastique. Vous constaterez que les bonds sont d'autant plus longs que l'élastique est plus mou et qu'ils dépendent aussi des matériaux en présence.
Ce type de mouvement est responsable des sons musicaux émis par les instruments de musique à cordes frottées de la famille du violon, du grincement des portes dans les gonds desquelles « les gouttes d'huile se coincent », du crissement de la craie sur le tableau, du chant des grillons et des sauterelles, des bruits stridents émis par les freins de certains poids lourds, etc.
On comprend mieux désormais le titre de ce paragraphe. Oscillation de relaxation signifie que pendant une phase du mouvement, le système accumule une énergie potentielle qui se libère, se relaxe, brutalement, pendant la phase suivante.
Traces d'usure.
Les phénomènes que nous venons de décrire à partir d'objets dont les dimensions sont relativement importantes se produisent aussi à des échelles beaucoup plus petites, par exemple lors du contact des aspérités d'une pièce. C'est pourquoi on trouve dans de nombreuses traces d'usure les figures plus ou moins périodiques caractéristiques du stick slip. Lors des essais d'usure, le changement du bruit émis par les échantillons en contact peut être un élément d'information important, car il traduit immanquablement un changement de régime de frottement, changement qui n'est pas forcément perçu par les instruments de mesure utilisés dans le montage.
Sismologie.
L'un des phénomènes qui se produisent lors des tremblements de terre est en tous points analogue au stick-slip que l'on rencontre en mécanique. On sait que la croûte terrestre est constituée de « plaques » qui se déplacent les unes par rapport aux autres selon différents processus. Ces plaques peuvent en effet glisser l'une contre l'autre selon des surfaces de fracture ou « failles », ou encore passer l'une sous l'autre dans un mouvement dit de « subduction ».
Les déplacements relatifs sont très lents et se font d'abord grâce à une déformation progressive des roches en contact de part et d'autre des surfaces de glissement. Lors de cette déformation, qui est partiellement élastique, d'énormes quantités d'énergie potentielle sont accumulées. Simultanément, les contraintes de cisaillement augmentent au niveau des surfaces de contact. Lorsque la limite d'adhérence de ces surfaces est atteinte, un glissement brutal se produit, l'énergie emmagasinée dans les roches se trouve brutalement libérée, avec les conséquences que l'on sait : bâtiments détruits, ouverture de crevasses dans le sol, etc.
Depuis quelques années, on commence à s'inquiéter des conséquences de l'action humaine sur l'apparition des séismes. Celui qui s'est produit à Pawnee, dans l'Oklahoma, en septembre 2016, a atteint une magnitude de 5,7 ; le mécanisme de la rupture a été étudié par l'Institut de physique du globe de Paris, en associant les observations de terrain classiques, les données satellitaires et une modélisation numérique. Il est désormais démontré que les activités humaines peuvent « réveiller » des failles dormantes situées à plusieurs kilomètres et de déstabiliser les sols sur des zones très étendues.
À cause de la fracturation hydraulique pratiquée à grande échelle pour l'exploitation pétrolière, l’État de l'Oklahoma est devenu plus instable que la Californie ! Avant 2009, il subissait moins d'un séisme de magnitude égale ou supérieure à 3 par an ; on en a compté environ 600 en 2014 et plus de 800 en 2015. L'action de la population et de la presse a conduit les autorités de l'Oklahoma à prendre des mesures de régulation grâce auxquelles le nombre de séismes a légèrement baissé, environ 500 « seulement » en 2016, mais trois d'entre eux ont atteint une magnitude supérieure à 5 et occasionné des dégâts matériels.
Frottement de pivotement.
Il s'agit d'un cas particulier du frottement de glissement, avec une vitesse de glissement variable dans la zone d'appui.
Une bille, qui repose ici dans une alvéole en forme de calotte sphérique, est chargée verticalement par une force formula_39. Pour la faire tourner à la vitesse formula_40 par rapport au support, il faut lui appliquer un couple formula_41.
Ce couple, créé par les résistances passives, freine d'autant plus la rotation que le facteur de frottement est plus élevé et que l'appui est plus étendu et plus chargé. Il dépend en outre de la façon dont se répartissent les pressions de contact entre la sphère et le support.
Il est toujours possible d'écrire le couple de frottement de pivotement sous la forme suivante :
Tout se passe comme si le contact des deux objets se faisait sur une couronne circulaire de rayon moyen R.
Ce rayon fictif R est le facteur de frottement de pivotement.
Si le couple « moteur » est insuffisant, la bille ne tourne pas, il y a adhérence, dans ce cas :
Sous sa simplicité apparente, ce petit problème cache beaucoup de choses :
Dans tout contact apparemment immobile, il y a pratiquement toujours des zones dans lesquelles se produisent des glissements tandis que partout ailleurs règnent des efforts de cisaillement inférieurs à la limite à partir de laquelle le glissement se produit.
Pour comprendre ce phénomène, une expérience très simple suffit : pressons nos deux mains l'une contre l'autre, paume contre paume, doigts étendus et serrés. Normalement, par symétrie, leur contact est une surface plane. Lorsque nous les faisons tourner de quelques degrés l'une par rapport à l'autre autour du « poil dans la main », les premiers glissements se produisent au bout des doigts tandis qu'au niveau des paumes, l'élasticité des « tissus mous » autorise la rotation des structures osseuses sans pour autant que le glissement se produise. Une fois que les doigts ont glissé, ils ne reprennent pas spontanément leur position initiale, on ne peut les y ramener que par l'application d'un couple de sens contraire au précédent.
Pivotement dans un contact ponctuel « hertzien ».
Deux solides bombés parfaitement indéformables mis en contact l'un avec l'autre devraient théoriquement se toucher par un seul point. Évidemment cette représentation est fausse car le moindre effort normal donnerait une pression infinie, ce qui est physiquement impossible. On l'utilise néanmoins à l'échelle macroscopique, lorsque les zones de contact sont très petites par rapport aux dimensions des pièces mises en jeu.
En réalité, les matériaux étant toujours plus ou moins déformables, le contact s'établit selon une petite surface dont l'aire augmente, mais pas de façon linéaire, lorsque l'effort normal croît.
Dans certaines conditions bien définies, que nous verrons plus loin, on peut parler de contact hertzien « ponctuel », par exemple celui d'une bille sur un plan). D'après la théorie de l'ingénieur Hertz, cette surface est en général une petite ellipse ou parfois un cercle ; la pression de contact, maximale au centre, diminue graduellement selon une loi elliptique jusqu'à la périphérie. Le diagramme donnant la répartition des pressions sur l'appui est donc un demi-.
On montre que dans ces conditions, le couple de frottement de pivotement est proportionnel au périmètre L de la zone d'appui ; f est bien sûr le facteur de frottement et P la charge normale au contact.
Cas d'une collerette d'appui.
Un cas particulier très fréquent est celui d'une collerette d'appui. La portée des deux pièces se fait sur une de petit rayon r et de grand rayon R chargée de supporter l'effort axial Q.
Si l'on suppose parfaite la congruence (du latin "congruus", qui s'accorde, qui convient) des deux surfaces de l'axe et du coussinet, la pression de contact est constante dans toute l'aire de contact. En admettant également que le facteur de frottement ait la même valeur f en tout point, il est facile de calculer le couple de pivotement :
Re est parfois appelé « rayon équivalent », tandis que le produit f.Re n'est autre que le facteur de frottement de pivotement.
Si R et r sont voisins, compte tenu de l'imprécision inévitable sur la valeur du facteur de frottement de glissement, on peut remplacer sans trop d'états d'âme le rayon équivalent par le rayon moyen Rm :
Frottement de roulement.
Une bille ou un rouleau qui roule sans glisser sur un plan horizontal, sans recevoir d'énergie extérieure, ralentit et finit par s'arrêter sous l'effet des frottements internes aux pièces. On peut maintenir la vitesse constante par application d'un couple formula_47 parallèle à l'axe de la rotation.
La zone d'appui, plus ou moins étendue, subit des pressions qui peuvent être relativement faibles (pneumatiques automobiles ...) ou très élevées (couramment 3000 à 3500 MPa dans les roulements à billes ou à rouleaux). Le corps roulant (supposé, sur ce schéma, moins déformable que le support) et la piste s'affaissent toujours plus ou moins lors de la mise en contact, puis reprennent leur forme initiale, du moins si les déformations sont restées élastiques. Dans le cas contraire, le corps roulant laisse une « ornière » dans la piste, comme fait une roue qui parcourt un sol meuble.
Comme les matériaux réels ne sont jamais parfaitement élastiques, le retour à la forme initiale, même quand il est total, n'est pas instantané. Un « bourrelet » (b) se forme à l'avant du corps roulant, tandis qu'à l'arrière les surfaces se séparent un peu trop vite ; tout se passe comme si le corps roulant montait une pente sans fin. De ce fait, les forces de contact sont plus élevées à l'avant de la zone de contact qu'à l'arrière et leur résultante formula_48 n'est pas directement opposée à la charge normale formula_49 mais décalée vers l'avant d'une certaine distance d telle que :
formula_50
Les valeurs de formula_51 et formula_52 sont ici, bien évidemment, des normes. La distance d est le facteur de frottement de roulement, ou encore coefficient de frottement de roulement.
Il est souvent intéressant de considérer le frottement de roulement d'une manière plus globale, combiné ou non à d'autres formes de frottement. Ainsi, lors de l'avancement d'un objet de poids formula_49 monté sur des rouleaux, la poussée formula_54 tient-elle compte globalement des frottements de roulement dans l'ensemble des zones de contact.
Dans le cas d'un véhicule sur roues, la poussée intègre non seulement les frottements de roulement des bandages ou des pneus sur le sol, mais encore les frottements de roulement ou de glissement des essieux dans leurs paliers, les frottements de glissement dans les joints d'étanchéité, etc.
Cela donne par exemple, par tonne de véhicule, des valeurs de formula_55 de l'ordre de :
Ces valeurs ne tiennent compte que du roulement et n'intègrent ni la pente éventuelle de la piste ni la résistance de l'air. Elles indiquent toutefois que sur un parcours horizontal et à vitesse modérée, de 80 à 100 km/h, à masse égale, le transport de marchandises par la route consomme de 5 à 10 fois plus d'énergie que le transport ferroviaire.
Frottements combinés.
Dans de nombreux cas, les mouvements relatifs des solides sont combinés, et il en va de même pour les résistances passives. Considérons par exemple deux solides quelconques : A, fixe par convention, nous servira de repère et B, mobile, en contact avec A par une certaine surface S que nous considérons ici comme très petite et plane.
En un point formula_56 de cette surface nous pouvons exprimer les éléments de réduction du torseur cinématique représentant le mouvement de B par rapport à A :
Il est toujours possible de « décomposer » de manière unique le vecteur taux de rotation en deux parties :
Les efforts appliqués par A sur B doivent être reliés, autant que faire se peut, aux mouvements de B par rapport à A. Ils sont composés d'une force formula_63, résultante des forces appliquées sur la surface S, et d'un couple formula_47.
L'absence de pivotement ne signifie pas que le couple de résistance au pivotement est nul. C'est peut-être ce couple, justement, qui empêche le mouvement correspondant. S'il existe, il est normal à la surface S et sa direction est donc connue, mais on ne connaît pas son sens.
En l'absence de mouvement de roulement, le couple de résistance au roulement existe probablement, il est de toute manière tangentiel, donc dans le plan de S, mais on ne connaît pas sa direction.
Le glissement, le pivotement et le roulement sont le plus souvent indépendants (mais pas toujours) et a priori rien ne relie les trois efforts fondamentaux qui tendent à s'opposer à ces mouvements.
Pour prendre un exemple pratique, examinons le contact d'une bille qui peut se déplacer dans une piste cylindrique de même rayon.
Si ces deux pièces étaient parfaitement réalisées et parfaitement rigides, leur contact se ferait selon un arc de cercle. En pratique, on ne peut pas plus réaliser deux surfaces géométriquement exactes que deux rayons parfaitement identiques. Même si ce bel ordonnancement pouvait exister, les déformations et l'usure auraient d'ailleurs tôt fait de le détruire.
Comme on ne peut évidemment pas compter sur les miracles pour faire fonctionner les machines, il faut réaliser délibérément deux rayons légèrement différents.
Si la bille pivote autour d'un axe normal au contact en son centre, seul le point central est immobile ; tous les autres points sont le siège d'un glissement à une vitesse d'autant plus grande qu'ils sont plus éloignés de l'axe.
Si la bille roule sur la piste, on conçoit immédiatement que cela ne peut pas se faire sans glissement Si la bille porte au centre, elle avance en un tour d'une longueur égale au périmètre du cercle central C. Si elle porte sur les arêtes latérales, elle avance en un tour du périmètre des cercles B. Si le contact se fait selon un arc, elle avance d'une longueur intermédiaire entre ces deux périmètres.
Dans ce dernier cas, l'axe instantané de rotation formula_78 de la bille se situe à un niveau intermédiaire entre le fond et les bords de la piste. En I et I' le vecteur taux de rotation formula_79 n'est pas perpendiculaire au contact, mais oblique ; on peut le considérer comme la somme de deux composantes, un taux de pivotement formula_40 et un taux de roulement formula_62.
A priori l'usure d'un tel contact est d'autant plus grande, en un point donné, que la pression et la vitesse de glissement sont plus élevées.
Chocs avec frottement.
Lorsque deux corps animés de vitesses différentes en grandeur et/ou en direction se rencontrent, il se produit un phénomène appelé choc ou percussion
On considère généralement en mécanique qu'un choc engendre des efforts très importants qui agissent pendant un temps très court, voire de façon quasi instantanée. Pendant ce laps de temps, les objets subissent des changements brusques de vitesse mais leurs positions ne varient pas notablement.
Les premières études de chocs sans frottement sont dues à Newton. , vers 1820, a traité divers cas particuliers, mais toujours sans frottement. Beaucoup d'autres auteurs ont travaillé sur ce thème, parmi lesquels Cournot, (1835), Phillips (1849), Darboux (1874), Joukovsky (1878), Ostrogradsky, Soula et Villa (1923). Delassus et Pérès ont étudié des situations plus complexes, comme les chocs avec glissement suivi de roulement.
La tendance actuelle est d'étudier les chocs à l'aide d'ordinateurs, par des méthodes numériques. La prise en compte du frottement se fait toujours, faute de mieux, en supposant que le facteur de frottement reste constant dans toute la zone de contact et pendant toute la durée, du choc, ce qui ne peut constituer au mieux qu'une approximation, mais rend finalement assez bien compte tout de même des phénomènes réels (à condition, évidemment, d'adopter une bonne valeur).
Les bons joueurs de billard n'ont pas besoin de calculs complexes pour évaluer les divers effets du frottement lors du choc des boules ...
« Extinction du frottement ».
P. Appell a fait remarquer, en 1905, que le mouvement d'un système qui subit le frottement s'effectue toujours de façon que le travail des forces de frottement diminue de plus en plus, comme si ce système cherchait à échapper au frottement. Une boule de billard à laquelle on donne de l'effet commence par glisser en roulant, mais très vite le glissement cesse et seul le roulement se poursuit jusqu'à l'arrêt complet.
L. Lecornu, dans des mémoires adressés à l'Académie des Sciences en 1906 et 1907 et intulés « Sur l'extinction du frottement », indique que dans les systèmes frottants abandonnés à eux-mêmes, «le travail de frottement, rapporté à l'unité de temps, va constamment en diminuant et qu'à l'état final le travail du frottement est devenu minimal. »
Notons que le travail rapporté à l'unité de temps n'est autre que la puissance.
Lecornu a repris et développé cette idée en 1937.
Ambiguïtés et paradoxes, arc-boutement, broutage.
P. Painlevé a montré que les lois du frottement sont souvent grossièrement approchées par rapport aux phénomènes réels et qu'elles peuvent conduire à des résultats ambigus ou paradoxaux.
Indéterminations.
Dans bien des cas le mouvement d'un objet soumis au frottement ou à l'adhérence est totalement imprévisible. Prenons par exemple une simple bande de plastique un peu épais, plions-la en deux et posons-la en forme de formula_82 (lambda majuscule) sur un plan. Très vite, le plastique se « relâche », la bande glisse, se stabilise, glisse à nouveau, se restabilise, et ainsi de suite ; des périodes de « repos » de plus en plus longues séparent des mouvements brusques.
Il est facile d'observer qu'au début d'un mouvement, le glissement n'est pas symétrique : l'un des « pieds » du formula_82 glisse avant l'autre, sans que l'on puisse prévoir lequel glissera en premier. Il est également presque impossible de prévoir à quel instant un mouvement aura lieu ; même si l'on pouvait facilement évaluer les contraintes qui règnent dans le plastique, cette question resterait pratiquement sans réponse.
Mouvements de broutement.
Ils ont été étudiés plus haut dans la partie consacrée aux « oscillations de relaxation ». Dans la mesure où ces mouvements produisent des bruits et des vibrations presque toujours indésirables, on tâche de les éviter en utilisant le frottement de roulement ou le frottement fluide, et de toute manière en faisant en sorte que les frottements aillent en croissant lorsque les vitesses augmentent, et jamais l'inverse.
Ceci est particulièrement vrai pour les freins et les embrayages, à propos desquels on trouvera des données constructives dans le chapitre Tribologie - Applications pratiques.
Arc-boutement.
Le phénomène d'arc-boutement se produit dans un système mécanique lorsque la configuration de celui-ci est telle que l’adhérence empêche tout mouvement et maintient donc l'équilibre, quelle que soit l’intensité des actions mécaniques extérieures.
Un exemple classique et connu de tous est celui du tiroir de commode qui se met légèrement en biais et se « coince » lorsque l'on veut le refermer. Chacun sait que ce n'est pas en poussant plus fort que l'on peut atteindre le but recherché. L'expérience personnelle indique que le tiroir s'immobilise d'autant plus facilement que son guidage est moins profond que large, que le tiroir est chargé d'un seul côté, que l'on ne pousse pas dans l'axe, etc.
De nombreux outils, mécanismes ou dispositifs, comme la clé du plombier ou le serre-joint du menuisier, utilisent l'arc-boutement pour assurer l'immobilisation de certains éléments.
L'arc-boutement peut parfois survenir de façon brutale dans des mécanismes trop usés ou mal lubrifiés et il peut se révéler fort dangereux lorsque des éléments de forte inertie se trouvent soudain immobilisés. Les risques sont diminués en utilisant des guidages par roulement plutôt que des guidages par glissement et, par ailleurs, les mécaniciens expérimentés savent qu'il faut toujours substituer, lorsque c'est possible, les guidages en rotation aux guidages en translation ; autrement dit, il vaut toujours mieux utiliser des pivots plutôt que des glissières.
Les alpinistes et les grimpeurs utilisent souvent des coinceurs pour s'assurer en en bloquant un dans une fissure. Beaucoup de ces dispositifs utilisent le principe de l'arc-boutement, à l'exemple du coinceur à deux cames représenté ci-contre. Les pièces de ce dispositif ont une forme telle que plus on tire sur la tige, plus les cames appuient sur les parois, sans pour autant glisser car les angles des forces d'appui restent toujours inférieurs à l'angle d'adhérence défini plus haut.